Par le Père Jacques Bombardier, de l’Oratoire de Nancy
Une naissance inaperçue
L’oratoire tire sa source de la vie même de St Philippe dès son arrivée à Rome ( 1535-1537) : dans sa vie solitaire , dans ses nombreux contacts à l’Université et dans les rues du centre de la Ville ainsi que de sa Pentecôte personnelle de 1544.
Son premier soin fut pour les malades (p.38) et presqu’aussi spontanément pour les pauvres qui erraient dans les rues de Rome. « leur mal , c’était l’oubli de Dieu…les causes en étaient l’ignorance, l’aveuglement, la séduction du péché, l’attrait démoniaque de la damnation »(38) Alors , d’après son premier biographe Bacci (39), il « résolut de s’adresser à des inconnus comme lui … Ses premiers interlocuteurs se recrutèrent parmi les garçons de course des magasins avec lesquels il échangeait des nouvelles et parlait de leur métier…Il avait su se modeler un personnage propre à établir le dialogue . Il était le jeune homme que l’on rencontre par hasard, auquel on ne prête guère attention car il appartient au vécu quotidien dans lequel il sait se fondre…Mais cette indifférence engendrée par l’habitude et par nature inefficace, il sut la transformer en un enseignement qui se gravait dans l’âme…il ne cherchait pas d’effets grandioses et imprévus ; tout porte à croire que son discours était plat et presque commun mais tirait une grande efficacité de ce qui constituait sa vertu principale : la certitude. Le sujet le plus banal de la conversation la plus commune touche, à un moment ou à un autre, au surnaturel. C’était de ce point de départ que Philippe prenait sa lancée, sans recours à une tactique élaborée mais à la lumière d’une vérité éclatante….Il se mettait alors à expliquer l’amour de Dieu. Il le décrivait avec la précision d’une gravure qui ne laissait pas de doutes à ses auditeurs sur la vérité de ses affirmations…Il était franc, plein d’aisance, volontiers facétieux, toujours joyeux et plein d’humour jusqu’au moment où, soudain grave, il abordait le sujet qui lui tenait à coeur, avec le sérieux de son caractère et la profonde conviction qui l’inspirait…une sérénité profonde empreinte d’une grande douceur. »(40)
Ce premier oratoire vivait dans une « coquille » qu’il avait reçue: la Confraternità della Carità cise en l’église San Girolamo della Carità , non loin de la via Giulia . La raison en était que le Père spirituel de St Philippe demeurait dans ce convict de prêtres de San Girolamo. Ces prédications « lui attachèrent un noyau de fidèles Une quinzaine d’hommes simples, principalement des artisans, s’assemblèrent régulièrement autour de lui. » (58)
La première institution
Ce fut la création avec ces jeunes gens et son père spirituel Persiano Rosa, d’une confrérie pour l’accueil des pélerins et le soin aux convalescents. (59) Elle fut appelée « della Trinità » et sise dans l’église toute proche de San Salvatore in Campo et de San Girolamo: l’église de la Trinité. Nous sommes en 1549-1550.
L’ordination
Elle fut proposée à St Philippe par son confesseur et reçue dans l’année 1551 (le sacerdoce le 23 mai) (66). Cette ordination conduisit Philippe à quitter la maison des Caccia et à s’installer dans le convict de prêtres de San Girolamo della Carità. C’est alors que commence l’autre source de l’Oratoire:le confessionnal de St Philippe. Le procès de canonisation dit « six heures par jour! » (70) Et »sa chambre ne tarde pas à devenir une succursale du confessionnal…Peu à peu on s’organise ; il se voit obligé d’accepter une seconde petite pièce, en guise de salle d’attente » (71). L’après-midi, la chambre devient salon. A l’origine les visiteurs étaient limités à 7 ou 8 : deux florentins (Grazzina, Zazzara) un membre de la famille Massimo,deux orfèvres, les deux premiers véritables disciples:Taddeo Raspa et Enrico Pietra de Plaisance , grand catéchiste et enseignant , fondateur d’écoles pour les pauvres de Rome. « Ces jeunes gens sont de conditions sociales diverses, de différentes professions et d’inégale culture…Chacun apporte ses exigences propres auxquelles doit répondre un magistère humblement exercé pour rayonner dans tous les coeurs .Pourtant ces réunions évitent soigneusement tout caractère didactique et St Philippe, s’il exerce un souverain magistère, se garde bien d’en accepter les apparences. » (75)
De 1552 à 1555, le petit groupe s’accroit lentement mais continuellement. Tous visitent les malades et les prisonniers. , s’occupent des enfants. Ils se rencontrent, »apprennent à se connaître, échangent des idées et font part de leurs problèmes. Entre ceux qui entrent dans la chambre de St Philippe et ceux qui attendent dans la petite salle qui leur est réservée s’instaure un dialogue auquel chacun participe dans un climat de confiance et d’union. Au début c’est toujours Philippe qui prend la parole et devise simplement mais en abordant et en approfondissant avec talent des sujets importants pour tous…Bien, Mal , Vertus et Vices , replis cachés du coeur humain. Et chacun d’éprouver aussitôt le besoin de commenter, de contredire, de progresser; tous se mettent à échanger leurs idées, pour la plus grande joie de St Philippe. Sans s’en rendre compte, ils sont en train de réaliser un apprentissage d’un genre nouveau qui leur permet d’acquérir une science dont auparavant , ils ne soupçonnaient même pas l’existence. » (78).
L’extension
Dans tous les sens du terme :
- extension avec l’aménagement d’une salle de rencontre plus grande, l’Oratoire, et l’édition de livres nécessaires à la lecture et au chant.
- extension avec un plus grand nombre de participants dont Baronius en 1557 et Tarugi.
- extension enfin dans la profondeur de la conversion et de la ferveur du groupe, dans l’oubli des honneurs et des vanités humaines.
Les conversions se multiplient, les petites gens accourent comme les grands. C’est une véritable contagion . C’est vers 1554 que St Philippe accepta dans son groupe de pénitents des femmes qu’il avait jusque là écartées. La première accueillie est Fiora Ragni, suivie d’autres , en particulier des femmes de musiciens qui faisaient partie de l’Oratoire. (Ponelle 140-1)
Les rencontres de l’Oratoire se structurent et se diversifient à cette époque. (82) :
- l’oratoire du début de l’après-midi : (pendant la sieste! ) C’est le plus suivi. C’est aussi le plus varié dans sa composition. C’est l’après-midi qu’avait lieu la discussion sur un livre : Pères de l’Eglise, Pères du désert, Imitation de Jésus Christ , sermons de Jean Tauler … (82.Voir aussi Cistellini I/104-5) C’est durant cet oratoire de l’après-midi qu’avaient lieu les quatre discours (d’une demi-heure) : histoire de l’Eglise, vie des saints , questions de morale et d’ oraison ou de vie spirituelle. (83) Le tout était entrecoupé de chants (83) avec l’arrivée, parmi les membres de l’Oratoire, de Giovanni Animuccia, grand musicien et successeur de Palestrina à St Pierre.
- l’oratoire du soir: au moment de l’Angelus du soir, ceux qui restaient du groupe autour de St Philippe se retrouvaient avec lui à l’église pour une heure de méditation et de prière. « L’oratoire, c’est un homme au milieu d’autres hommes qui n’ont comme but et comme soutien que la prière et l’échange des idées . Et cette piété submergea Rome. » (89)
- les promenades du dimanche : »partie de campagne et de prière » (100) Le dimanche après-midi , après les vêpres chantés à San Girolamo (Ponelle 169) le groupe partait en promenade à la campagne. Le matin, la prière qui ressemblait à l’oratoire du soir , les avaient préparés à la réception des sacrements. L’après-midi avant la promenade, Philippe faisait oratoire pour les jeunes gens.
La constitution de la communauté des prêtres (1564)
En 1563 ou au début de 1564, on proposa à St Philippe la cure de San Giovanni dei Fiorentini. St Philippe traîna pour donner sa réponse ; il ne voulait pas quitter San Girolamo! « Il imagina de pourvoir San Giovanni de chapelains pris parmi ses disciples et de rester lui-même à San Girolamo. » (Pon.211) Cette solution devait permettre aux disciples de demeurer à l’Oratorio. « Philippe ne tient qu’à L’Oratorio et ne veut que l’Oratorio. Mais par son acceptation, Philippe assurait à ses fils une situation et en les attachant à San Giovanni, il se les attachait. » (Pon.211). En même temps, il consolidait l’Oratorio. C’est ainsi que furent ordonnés : Baronius, Bordini et Fedeli. Et Baronius pouvait écrire à son père: » Nous vivons six prêtres ensemble, menant une vie tranquille ; nous travaillons au salut des âmes , nous sommes quasi adorés tant est grande la déférence et le respect que tous ont pour nous. » (Ponelle 212).
L’Oratoire avait tellement grandi que la salle de San Girolamo ne suffisait plus. Les Florentins pour faire plaisir à Philippe, aménagèrent une salle pour l’Oratoire dans la vieille église de S.Orsola della Pietà. Le nouvel Oratoire ouvrait sur la via del Consolato, face à St Jean des Florentins.(Pon.261).C’est dans ce lieu et à cette époque que l’oratoire reçut sa forme définitive.(Pon.216). «
D’abord on donnait à l’un des frères un livre à lire jusqu’à ce qu’il y eût assez de monde. Le livre était un traité sur les vertus ou quelque recueil d’histoires des saints. De cette lecture, un autre frère tirait un sujet qu’il allongeait en sermon, en l’expliquant avec plus d’exactitude ou bien en l’inculquant avec plus de zèle et en le développant utilement de tout autre manière. Un autre frère présentait ensuite au précédant des observations diverses et leur dialogue faisait un épisode beau et gracieux. Il réparait les omissions, reprenait les points douteux et recherchait tout ce qui pouvait être dit d’utile dans le genre au profit de l’auditoire. Car tout ce que Cassien avait jadis écrit au sujet des vertus, St Basile et St Grégoire dans les matières de morale, St Ambroise touchant les devoirs de la vie publique, tout cela assemblé, élaboré par le travail de cervelle et comme apprêté et servi sur table, était dégusté avec d’autant plus de plaisir. Succédait un frère avec un sermon étudié, <<elaborato sermone>, qui passait en revue les exemples des saints empruntés à des auteurs approuvés, choisissant surtout ceux qui représentaient la sévérité du jugement dernier, l’inconstance de la vie présente, le passage terrifiant de la mort, les supplices des tourments éternels et les récompenses de la vie bienheureuse. Après cela pour reposer l’auditoire, on jugea à propos de faire raconter à un autre frère d’une manière utile l’histoire de l’Eglise, tirée des meilleurs écrivains en la déroulant année par année, à dater de la venue du Christ. Un dernier enfin paraphrasait la vie de quelque saint, prise dans un auteur approuvé, avec grande utilité des auditeurs. Tout cela durait trois heures au moins et le public ne s’ennuyait pas. Le Père, président de ce repas spirituel, était là et tel un sage maître d’hôtel qui éprouve tout, s’il se présentait quelque ambiguïté ou quelque point insuffisamment expliqué, il l’exposait lui-même avec plus de développement. Pour finir, on chantait des cantiques spirituels composés spécialement pour les séances, et d’un art très relevé, cantica spiritualia ad haec summa industria composita, au grand plaisir de l’auditoire. Puis après une prière, tous étaient congédiés. » (Pon 216-217) Et le tout était vécu fort simplement: on entrait et on sortait à volonté; les orateurs parlaient assis, « ceux qui dialoguaient ayant leur place face à l’auditoire, sur un simple banc où Philippe s’asseyait aussi, les autres occupant à tour de rôle un siège au centre, élevé sur quelques gradins. » (Pon 217)
La constitution de l’Oratoire des prêtres
Le nombre des disciples de Philippe augmentait et beaucoup entraient dans sa communauté de prêtres. Le différend avec les Florentins à propos de la charge des fils de St Philippe dans leur église, conduisit le saint à chercher une église où il serait vraiment chez lui. Ils présentèrent une demande au Pape et parmi les propositions papales , Philippe choisit la Valicella. La Bulle papale de 1575 érigeait à perpétuité « une congrégation de prêtres et de clercs séculiers nommée oratoire.. » Plus qu’une simple attribution de domicile, cette Bulle était l’acte de naissance de la congrégation de l’Oratoire.(153). Philippe « n’avait pas vraiment prévu et vraisemblablement pas désiré la fondation d’une congrégation mais les événements lui avaient permis d’en instituer une selon son coeur. » (153) Et Ponelle d’ajouter « le petit groupe de prêtres que Philippe avait constitué pour le service de son oeuvre cesse de se confondre avec les convicts ecclésiastiques de San Girolamo della Carità ou de San Giovanni dei Fiorentini.. » (268)
Réflexion au sujet de cette histoire
Cette histoire de l’Oratoire, suivie pas à pas, est riche d’enseignement. Elle donne les grandes orientations de la fondation, orientations qui demeurent nécessaires par-delà les adaptations aux circonstances. Rien n’est fixé mais tout est donné dans le mouvement même de cette création de l’Oratoire. Toute fondation nouvelle doit s’inspirer de cette histoire, même si bien entendu, rien de cette époque ne peut être copié tel quel !
Pour St Philippe, l’oeuvre essentielle, c’est l’Oratoire (Oratorio = oratoire séculier. Par commodité, afin de ne pas les confondre, nous appellerons dans ce texte l’Oratoire séculier « Oratorio. ») La Congrégation des Pères naît « par hasard « mais pour que l’Oratorio vive! L’Oratorio jaillit de la grâce particulière de St Philippe; c’est tellement « son » oeuvre qu’il n’ y a pas de décision de fondation ni de projet mûri longuement à l’avance, couché sur le papier, soumis à l’examen et à la discussion. C’est l’unique oeuvre de St Philippe.
1- En 1575, durant l’année sainte, les pèlerins affluent à Rome. La Confrérie des Pèlerins fondée naguère par Philippe et des amis, fonctionne toujours; elle connaît même au cours de cette année-là son apogée. St Philippe n’y paraît pas et ne fait rien d’autre que son habitude à l’Oratoire et à la Valicella! Certains disciples du saint participent aux activités de la Confrérie des Pèlerins; St Philippe s’en réjouit mais il ne leur a rien demandé et lui, il n’y fait rien. Tout est pour l’Oratorio! (Pon.275). On peut même préciser davantage: pour St Philippe, seul compte l’Oratorio de l’après-midi où la foule se presse. Celui du dimanche ( en particulier la promenade) n’est qu’une approche des âmes; celui de l’après-midi les forme à la sainteté ! (Pon.349) Celui du soir est pour les intimes, comme une conclusion de la journée. Baronius insistera souvent sur le fait que l’Oratorio est l’imitation de l’Eglise primitive, où les croyants n’avaient qu’un coeur et qu’une âme. C’est en vivant ainsi d’une charité parfaite que l’Oratorio attirait et évangélisait. La foi nourrie en communauté et dans l’expérience spirituelle personnelle, permet à chaque membre de l’Oratorio d’être plus fort pour son témoignage personnel auprès de sa famille, de ses amis et de son entourage.
2- En effet, l’Oratorio est fondé par Philippe pour arracher ses « concitoyens de quartier » à l’oubli de Dieu, à l’ignorance, à l’aveuglement et à la séduction du péché. Sa contemplation solitaire et amoureuse de Dieu a fait naître en lui cette compassion qui le porte à tout faire pour sauver le prochain. Toute la visée de l’oeuvre est donc la conversion et la sanctification. Malgré l’attrait de Philippe pour le soin des malades et pour l’instruction des enfants, jamais il ne s’y consacra ; jamais il ne se détourna de cette tâche de l’Oratorio même s’il encourageait le soin des malades et l’instruction des enfants. En revanche le catéchisme aux enfants avait tous ses soins comme faisant partie de l’Oratorio.(Pon.276) Cette préoccupation centrale explique le style pratique de l’oeuvre. S’il y a vie fraternelle, s’il y a apostolat actif (prédication, catéchisme, rencontres), c’est dans l’orientation de la conversion et de la sanctification. C’est cette sanctification fraternelle qui est évangélisatrice, comme par surcroît , par émanation, par contagion! … comme par inadvertance! St Philippe a con même y penser. Il s’est simplement attaché à convertir ses proches, à les conduire le plus près possible du Seigneur dans la certitude que les saints sanctifient ceux qu’ils approchent et qu’ils entraînent leurs prochains dans leur course vers Dieu. D’où l’orientation des lectures de l’Oratorio de l’après-midi – parole de Dieu et prédication familière – pour conduire à la conversion et à la ferveur, vie des saints et chapitres de morale accordée aux Pères du désert la conversion et leurs méthodes radicales! à l’Imitation de Jésus Christ pour son christocentrisme sans adoucissement.
Sacrement de pénitence (reçu chaque jour pour les disciples les plus proches), de la direction spirituelle commune qu’est l’Oratorio, prolongée lus personnelle. On évangélise par le baptême, on ré-évangélise par le sacrement de pénitence.
3 – Le rayonnement de l’Oratorio tient aussi à la calme certitude qui habite St Philippe. Elle vient d’abord de sa contemplation solitaire aux catacombes ou, plus tard, sur le toit de sa maison; elle vient aussi de l’étude: juste ce qu’il faut, car trop de science enfle…juste ce qu’il faut , mais tout ce qu’il faut ! St Philippe étonnait toujours, même les plus savants, par l’extrême précision et la grande qualité de sa documentation ainsi que par la perspicacité de ses développements théologiques. (Pap.35) Cette calme certitude vient aussi du développement des qualités naturelles tel que l’extrait de l’épitre aux Philippiens lu à sa messe en dresse l’inventaire et en donne le conseil. Mais tous ces éléments (contemplation, étude, vertus naturelles) ne sont opérants que parce qu’ils sont pris dans la grâce des sacrements , des visites fréquentes aux saints, en particulier des martyrs, dans un grand amour de l’Eglise. On comprend la place considérable que tient l’Eucharistie dans la vie de St Philippe, de plus en plus au fur et à mesure qu’il avance en âge et en sainteté ! Elle transforme sa chair, elle unifie son être, elle l’établit en Dieu, tellement, qu’il demeure dans l’Eucharistie et qu’il lui faut beaucoup d’heures pour célébrer la messe.
Du temps de St Philippe pourtant, ce soin de l’Oratorio n’excluait pas d’autres ministères pour les Pères de l’Oratoire. On peut dresser l’inventaire des ministères qu’ils exercèrent (Pon.417): ils administraient deux paroisses: la Valicella et San Giovanni dei Fiorentini, à nouveau à partir de 1584. Ils assuraient l’aumônerie du collège polonais fondé à Rome en 1582 (même si ce fut de courte durée en raison de la fermeture du collège par manque de fonds). Ils assuraient l’aumônerie des Oblates de Ste Françoise Romaine de Tor di Specchi, tous les jours, l’aumônerie du collège grec, le service des prisonniers du St Office ; ils participèrent également au travail des organismes de mise en application des réformes du Concile de Trente : visite des églises de Rome, gouvernement spirituel de la ville, participation aux congrégations du St Siège (évêques, vice-gérant…) participation aux activités charitables de la ville.
En 1588, la Congrégation de Rome voulut réduire tous ces ministères qui dispersaient la communauté et conduisaient à négliger l’Oratorio! On décida de tout résilier, y compris le caractère paroissial pour la Valicella ! En fait, on se sépara simplement de San Giovanni dei Fiorentini. Les autres ministères ne cessèrent qu’après la mort de St Philippe et jamais complètement.
Les premiers participants à l’Oratorio (oratoire séculier )
Les deux premiers compagnons de St Phlippe, du temps de San Girolamo et sans doute d’avant même l’ordination, sont Grazzini et Parigi. Ils sont les plus proches parmi les 8 premiers disciples qui viennent chaque après-midi dans la chambre du Saint pour déjà vivre l’Oratorio: Massimo, romain de race et de naissance, Monte Zazzara, Michele da Prato fabricant de bonnetrerie, Francesco et Sebastiano, jeunes orfèvres, Loys Amès un angevin.
Puis vinrent quelques femmes (en 1554 ), un « trio »: Fiora Ragni, jeune femme des environs d’Urbin, elle qu’il appelle « ma fille première-née »; Antonia Ceca, aveugle, vêtue en tertiaire et priant sans répit ainsi que Lucretia Animuccia, mariée au musicien Giovanni. Plus tard, d’autres suivirent, femmes ou mères de musiciens : Delia Buscaglia, femme de l’instrumentiste Brissio et mère de Franceso Brissio auteur de motets; deux soeurs, Bradamante et Fulvia, la seconde mère du très célèbre compositeur G.Francesco Anerio.
1555 voit l’entrée de Tarugi, le modèle accompli du parfait homme de cour. Il est suivi de deux poètes célèbres: Giacomo Marmita et Gabriela Tana qui devait mourir saintement deux ans plus tard…puis du médecin calabrais Gian Battista Modio, dévoyé célèbre !
« L’Oratorio est désormais pourvu d’une clientèle bigarrée. Vieux confrères de la Trinità de’ Pellegrini, Tosino, Corstella, Vincenso Miniatore, qui font tout à tour et à l’envi des morts les plus édifiantes; courtisans récemment échappés à la corruption du monde; médecins et lettrés, habitués de réunions bourgeoises où l’on fraternise en joyeux propos; commerçants florentins; boutiquiers; gens de métier, un tailleur comme Francesco Vai, un peintre comme Horatio de Modena. Par une chance que l’on jugera plus tard providentielle, fit de bonne heure partie de la troupe un musicien, le célèbre Giovanni Animuccia. Il entre à l’Oratorio l’année même où il succède à Palestrina dans la charge de maître de chapelle de St Pierre. Il attira des congénères, si bien qu’à partir de son accession, chaque jour d’Oratorio, sans en manquer un seul, se trouvèrent désormais des chanteurs en nombre pour clôturer par un motet polyphonique les réunions. ( … ) Nul doute que Philippe ne se soit enchanté de cette diversité et n’ait joui de cette confusion de seigneurs et d’artisans, de lettrés et de simples….Philippe ne fuit pas, il recherche, il accentue les contrastes. Il faut remarquer encore que toutes ses recrues étaient laïques. » ( Pon. p.123-154)
1557 vit l’entrée de Baronius, étudiant âgé de 19 ans, le disciple le plus taquiné par St Philippe et le plus proche de lui au point d’être son premier successeur; puis Bordini l’année suivante à la Pentecôte: petit jeune homme instruit et sage qui ne quittait guère la chambre du saint avant de devenir un grand orateur de Rome et de quitter l’Oratoire.
Après les terribles années 1558-59, années de critiques et de persécutions de l’Oeuvre de St Philippe, la vie reprit avec l’avénement de Pie IV. Le recrutement de l’Oratorio reprit au petit bonheur. Un membre de l’illustre famille des Massimi, Fabritio, entre à l’Oratorio.
Les indications de pages renvoient au livre: » Philippe Néri un homme dans son siècle »de G. Papasogli.Téqui.1991